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II - Le problème des parentés linguistiques du basque.

Nous venons de présenter une série de concordances lexicales entre des termes de basque et des termes d’origine japonaise ou de chinois ancien. A notre connaissance, un travail approfondi de la parenté linguistique basco-japonaise n’a pas été mené à bien antérieurement à cette communication.

Dans le cadre de cet exposé, nous ne pouvons pas rechercher les diverses causes de cette situation, de façon exhaustive, mais nous croyons utile d’en indiquer quelques raisons.

Tout d’abord, il convient de noter que des travaux de linguistique comparative auraient du, logiquement, être effectués au sujet de ces deux langues. Pourquoi ? Pour la raison simple que voici. Quiconque a comparé, même sommairement, la phonétique du basque et du japonais, n’a pas pu ne pas être frappé par des ressemblances.

Un effort de recherche n’a cependant pas été engagé dans cette direction d’une parenté basco-japonaise. Essayons d’en analyser les raisons. Trois catégories d’obstacles se sont présentées à l’encontre d’un tel effort qui sont liées au comportement de trois catégories de linguistes :

1) Nous rangerons dans un premier groupe les linguistes qui, a priori, écartent toute migration du peuple basque au cours de l’histoire. Leur intime conviction ne s’appuie, à la vérité, sur aucun critère scientifique mais revêt un caractère dogmatique.

Sans migration, il ne peut y avoir de parenté linguistique. Par conséquent, pour ce premier groupe de linguistes, il est inutile d’engager une recherche de linguistique comparative du basque avec tout autre idiome.

2) Un deuxième groupe de spécialistes du basque estime que la position du premier groupe est trop absolue. Il ne ferme pas la porte à une recherche de parenté linguistique du basque : il s’intéresse, par exemple, aux langues du Caucase et aux populations de l’Altaï que G. Dumézil a qualifiées un jour, excellemment, « d’ethnodrome ».

Ce deuxième groupe, toutefois, tend à limiter l’extension territoriale des recherches.

L’Extrême-Orient est considéré, par ces linguistes, comme bien lointain ; ils pensent que les « isolats » basques et japonais sont à peu près incapables, en raison de leur distance, d’avoir échangé du vocabulaire, à quelque période de l’histoire que se soit.

Ce groupe tend donc à privilégier une recherche comparative qui s’étend vers l’est jusqu’à l’Oural mais ne dépasse pas nettement cette limite.

3) Nous distinguerons, enfin, un troisième groupe. Ce sont des spécialistes de valeur qui, par instinct, font des observations très justes mais, dans des conditions telles qu’un travail de recherche approfondi n’est pas véritablement engagé par ce qu’il disent ou par ce qu’ils écrivent.

Nous pensons que le cas de P. Lafitte est un bon exemple de ces hommes très cultivés mais qui n’ont pas tiré de leurs observations les conclusions qui auraient pu modifier l’orientation de la recherche des parentés linguistiques du basque.

Auteur en 1944 d’une grammaire, rééditée en 19629 et unanimement considérée comme excellente, il traite des origines de la langue basque au début de sa grammaire dans un « raccourci historique ». Il évoque les inscriptions romaines, datant du début de notre ère, dans la péninsule ibérique, et après avoir cité une série de celles-ci, il écrit : « ces noms aquitains sonnent basque, c’est exact ; mais on en trouverait d’aussi curieux sur n’importe quelle carte du Japon ». L’observation est extrêmement pertinente. Enoncée dans un texte d’introduction d’une grammaire, elle n’avait pas vocation à déclencher une recherche linguistique : on ne peut que le regretter.

Au total, des obstacles de divers ordres ont jusqu’à maintenant freiné les recherches sur la parenté linguistique basco-japonaise.

L’initiative que nous avons prise, en publiant cette communication, vise à faire évoluer cette situation.

Conclusion